Une vision iconoclaste et humoristique de l'innovation et des nouvelles technologies.
jeudi 10 mars 2011
NOUS SOMMES TOUS DES JAPONAIS
Je ne sais pas vous, mais depuis quelques jours, j’ai comme un malaise en me levant. Comme si quelque chose ne tournait plus très rond sur cette bonne veille terre.
On nous avait parlé de la révolution des NTIC, en jargon dans le texte, ou plus clairement des nouvelles technologies de l’information et de la communication, en langage technocratique ou plus simplement encore du web, qu’il soit deux point zéro, voire plus si affinité.
Depuis, je conjugue internet à tous les temps. Je twitte, tu skypes, il blogue, nous mailons, vous tubez, ils googlent. Bref, ce monde de nouveaux outils sensés nous faciliter la vie, la remplie d’un fatras d’informations inutiles, au milieu d’ilots de données pertinentes.
Combien d’entre vous, moi le premier, redoutons une absence du bureau pendant quelques jours avec la crainte, malheureusement pas du tout injustifiée, d’une boite mail débordant de messages en tout genre. Je ne parle pas des spams, mais bien de ces messages où l’on se retouve en CC (copie conforme) ou en Cci (copie conforme invisible), histoire d’être sûr d’avoir bien été abreuvé d’informations bien évidemment « stratégiques » mais surement inutiles. Ce déluge de mails professionnels n’est plus soutenable. Selon une récente étude, les managers passent entre 5 et 20 heures à lire ou à écrire ces missives électroniques. Efficace ? Pas si sûr ! Dans ce contexte, il faut signaler la décision radicale d’une très grosse société française de services informatiques qui vise à supprimer en 3 ans les mails internes. Un pari insensé ? Pas tant que cela si les réseaux sociaux interne qu’elle met en place, viennent se substituer intelligemment au flot de mails, dans ce partage de l’information communautaire.
Il est étonnant de voir combien les entreprises sont souvent frileuses face à ces nouvelles technologies et bloquent l’accès à des réseaux sociaux, considérant qu’il s’agit avant tout d’un loisir et parfois d’une porte ouverte sur l’espionnage. Mais il suffit de quelques clics, pour se rendre compte de la richesse d’informations ultra pertinentes que l’on va retrouver dans des micro communautés hyperspécialisées : «Dis , tu veux pas être mon ami dans le groupe des spécialistes du tournage fraisage du titane 6-2-4-2 ? ».
Ne soyons pas naïf pour autant. L’affaire Wikileaks a montré les dérives potentielles du système et la nécessaire déontologie des divers acteurs de la communauté. Le James Bond du siècle dernier, photographiant péniblement page après page un rapport confidentiel avec son appareil Minox, a fait place à un Monsieur tout le monde, récupérant, en quelques secondes sur sa clé USB, l’équivalent d’une encyclopédie.
Mais ces communautés montrent aussi combien il est difficile aujourd’hui de bloquer l’information, tant le réseau est « poreux ». Beaucoup ont parlé des soulèvements dans les pays arabes comme une révolution de la faim. C’est, à mon avis, beaucoup plus la révolte de la jeune génération Facebook, communiquant sans frontière et recherchant des conditions de vie plus acceptables. N’est-il pas étonnant de voir combien notre information, durant cette période, est essentiellement venue de « micro-blogging twitter » et de petits films postés sur YouTube, pendant que les services officiels confinaient les journalistes dans leurs hôtels internationaux ?
Et c’est peut être là, la seule vraie révolution des NTIC : nous devenons, par la magie du numérique, des citoyens d’un monde virtuel, nous affranchissant des distances, tantôt spectateur, tantôt journaliste, tantôt acteur. Ici, nous sommes au cœur de la place Tarhir au Caire. Là, notre écran bascule sous les coups de boutoir d’un tremblement de terre de force 9 au Sendai. Les noires eaux d’un Tsunami « dégeulant », tel un immonde serpent, sur des villes sans défense, sont soudain à notre porte.
C’est cette étonnante « lointaine proximité » qui résume sans doute le mieux, cette nouvelle vision du monde que nous bâtit Internet.
Alors comment ne pas penser dans cet immense deuil que vit le Japon, à nos collègues et amis qui vivent et travaillent dans ce si beau pays du Soleil Levant ? Comment ne pas penser à cette poignée de techniciens et d’ingénieurs de Fukushima qui portent au plus haut les valeurs humaines du sacrifice, pour tenter de préserver des millions de vie ?
A la leçon de nécessaire modestie que nous a infligé la Nature, l’Homme répond par la grandeur d’un geste ultime, au service des autres.
Alors oui, aujourd’hui, nous sommes tous des Japonais.
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