Une vision iconoclaste et humoristique de l'innovation et des nouvelles technologies.
lundi 3 septembre 2012
Génération Njüt, t’es qui toi ?
C’est fou comme les retours de vacances peuvent être pitoyablement gâchés. Ainsi, en ce lundi matin, alors que l’écran de mon ordinateur me renvoyait l’image d’un bronzage encore estival, une voix tonitruante venant d’on ne sais où, c'est-à-dire probablement du bout du couloir, fit vibrer les murs du bureau :
- Marcelle, dis, il me faudrait une chronique innovation grand public sur le progiciel, genre 3500 signes. T’as ça dans les tiroirs ?
- Bon, d’abord je ne m’appelle pas Marcelle, ensuite on dit « as-tu cela dans tes tiroirs, s’il te plait » et enfin, je ne sais même pas ce que c’est ton progi-machin. Alors, une page sur le sujet, tu penses bien que même avec un GPS ultra sophistiqué, je ne saurais pas par où attaquer le sujet.
- Super, donc c’est Ok pour demain 8 heures ! J’attends le papier !
Je ne sais pas vous, mais j’ai parfois l’impression que le boss, fut-il redac’chef, est toujours légèrement dur d’oreille au retour du week-end… Oh Sauveur Google, aide moi. Vite, taper: P-R-O-G-I-C-I-E-L. Au « return », un charabia pas très réjouissant se fait jour. Je savais bien que le sujet était pourri ! Allez passionner les foules avec des « Œufs ère Pet »(ERP), des Gépé Aho (GPAO), des MES et autres SAS. C’est quoi d’ailleurs ce machin de SAS : un « Son Altesse Sérénissime » du style des San Antonio que lisait mon père ? Pourtant j’en ai déjà vu des écrans d’ordi lors de mes premiers reportages dans les entreprises, moi, la « spécialiste » nouvelles technos au journal, du haut de mes 26 ans fraichement révolus. Et si je tiens exceptionnellement la rubrique innovation, c’est par intérim du « vieux sage », et parce que je suis un pur produit de la « génération Y », parait-il technophile. Comme vous dites, vous les babyboomers qui nous regardez avec étonnement (ou envie ?), nous on est dans la fougue, l’hyper connectivité, le zapping, l’instantané, le multitâche. Sur ma tablette multifenêtrée, j’alimente mon mur Facebook, j’écris un mail et je skype avec mon copain bossant à l’autre bout de la planète. Je connais par cœur les décalages horaires. Shanghai c’est +6, la Californie –9 et Sydney +8. Lorsque mon boss me parle du réseau, en pensant proximité et relation humaine, moi, ma communauté est sur la toile et elle est universelle. Alors faut nous comprendre, nous les Y si on ne pense pas exactement comme vous, les X. Il faut vous mettre dans la tête qu’on est des « DIGITAL NATIVE » : des biberonnés au web, des addicts du jeu video, des adorateurs de la carte SIM. Attendre 6 mois une ligne téléphonique comme l’ont vécu nos grands parents, où envoyer des télex avec parcimonie parce que c’est cher, c’est à des années lumière de notre compréhension, nous qui téléphonons pour dire, « on s’appelle tout à l’heure ». C’est pas un conflit de génération, c’est un autre monde. Regardez vos progiciels, ou plutôt « logiciels professionnels » pour répondre aux standards vocabularistiques de l’Académie Française, ils sont sérieux et efficaces avec leurs écrans bien construits. Mais nous, on bosse avec des applis sur nos smartphones . Pas la peine de tout révolutionner, mais mettre un peu de Peps et de couleur sur des interfaces modernes, ça ne ferait pas de mal.
Et puis, votre crainte du piratage de données, nous on vous dit : no stress . Facebook, on le vit au quotidien et on sait maitriser les risques ! On est tous dans le réseau mondial depuis tout petit : alors, à 20 ans, on est déjà des experts aguerris du control data. Combien d’entreprises ont lancé avec notre génération, un chantier de création d’une superbe page Facebook pour l’externe et se sont empressées de bloquer son accès en interne, de peur des fuites … oubliant un peu vite que la 3G illimitée des téléphones personnels contournait l’interdit ? Vous nous parlez sécurité, on vous parle rapidité. Chercher auprès des collègues une réponse à une question pointue, n’est pas toujours évident (je le sais bien avec ce P… d’article) : il faut repérer l’expert, s’il existe, lui formuler le problème et attendre, attendre, attendre la réponse, car un expert, ça a un agenda de malade. Forcément, c’est un expert. A l’inverse, envoyez vos interrogations vers des news groups spécialisés et en moins de 24 heures vous avez la réponse, souvent enrichie de multiples contributions.
Et votre « cloud computing », l’informatique dans les nuages, ou pour être moins poétique, la mise sur le réseau des données de l’entreprise, c’est toute une histoire ! Vous débâtez sur « y aller ou pas », sur la sensibilité des données, la localisation des serveurs, l’adaptation à la taille de l’entreprise. Nous, la génération Y, on vous regarde avec le sourire, car la question n’est pas « pourquoi » mais « quand » y aller. Le monde change, les entreprises se connectent entre elles, vous nous demandez de rester joignables et nous vous demandons d’accéder aux données, où que nous soyons, tout de suite, partout dans l’Univers, numérique bien entendu.
Car notre génération Y que vous croyez fondamentalement indépendante est viscéralement partageuse. Nous savons mettre en commun pour aller toujours plus vite, et de manière autonome. C’est comme cela que vous nous avez éduqués, non ? Jetez un œil sur les méthodes agiles, inventées par les geeks dans le développement des logiciels. C’est du bonheur pour nous. Là où le traditionnel chef de projet ne jure que par des diagrammes de Gant et d’immenses tableurs, le clan des agiles réduit les procédures au minimum, transforme les fastidieux points hebdomadaires en courtes réunions journalières où on solutionne, avec la « meute », les problèmes du moment tout en interagissant avec le client pour éviter les incompréhensions. Vous trouvez ça brouillon, mais vous découvrez que la qualité finale est meilleure. Vous …
Hum, en fait c’est peut être cela l’angle d’attaque de mon article : ma génération Y, celle de la playstation, du Mac Do et d’Ikea à l’assaut du progiciel. Bon, il me faudrait un titre choc, histoire de donner envie de lire, un truc du genre « Génération Njut, t’es qui toi ? ». Il ne me reste plus qu’à foncer sur le clavier. Et je signerai bien évidemment :
Marcelle
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