Une vision iconoclaste et humoristique de l'innovation et des nouvelles technologies.
mardi 1 octobre 2013
... CHAMPIONS DU MONDE !
Les américains sont les maitres incontestés du marketing. Ils en ont encore apporté la preuve éclatante, il y a quelques jours, en nous faisant passer pour des poires … en attendant la pomme. Car, qui a-t-il de plus planétaire que l’avènement d’un nouvel enfant de Monsieur Apple ? Tout avait été savamment orchestré. D’abord les « fuites » : une unique photo sur un site internet chinois qui montrait, avant l’heure, LE nouveau modèle. L’évènement s’annonçait exceptionnel, voire mondial : de source sûre, la marque californienne allait se lancer dans le low cost, et le bébé avait même un nom : i-phone 5C. Immédiatement, les meilleurs « spécialistes » internationaux du secteur se mirent à disserter sur « pourquoi et comment Apple allait faire cohabiter sa marque haut de gamme avec un i-phone du pauvre».
Le grand jour arriva pour un show qui n’avait rien à envier aux Oscars. Après une série de Keynote, le Power Point des Macophiles, le prix tomba : 550 dollars et même 650 si vous envisagiez la mémoire amphétaminée. Voilà bien une nouvelle stratégie de low cost à faire pâlir de jalousie RyanAir et autre hard discounter !
Apple venait d’inventer le low cost cher !
… A moins que la réalité soit bien plus banale. Le « C » de i-phone 5C, ne voulait peut-être pas dire « cheap » (pas cher) mais « color ». Apple avait réussi la prouesse de faire passer une simple coloration de son chouchou téléphonique, du statut de non-évènement absolu à celui de phénomène médiatique mondialisé ! Je vous l’ai dit, ce sont des champions ! C’était toutefois oublier un peu vite qu’au-delà des journalistes convertis, il y avait le marché. Et la réponse de la toile ne s’est pas faite attendre. Les geeks du monde entier ont réagi au quart de tour, n’aimant surement pas que le C du 5C les fasse passer pour des C… (en 4 ou 9 lettres). Nokia qui venait de colorer ses propres téléphones Lumia, se fendit d’un tweet à l’humour tout anglo-saxon : « merci Apple … l’imitation est la meilleure forme de flatterie ». D’autres se sont demandés si Apple n’était pas devenu une filiale des bonbons Haribo, de M&M ou des United Colors of Benetton. Etonnement, il semble aujourd’hui que les ventes ne soient pas tout à fait au niveau des espérances. Bizarre, non ?
Mais, chroniqueur retord, où nous amènes-tu ? Aurions-nous raté quelque chose ?
La réponse est évidemment oui, car pendant que le bruit de la pomme craquante assourdissait les ondes, on passait totalement à côté d’un admirable petit rapport de 45 pages, sorti dans la torpeur estivale sous le titre « panorama de l’électricité utilisée par l’écosystème numérique ». Bon, je vous l’accorde, le titre n’est pas très sexy, mais ceux qui ne jurent que par les tablettes, les réseaux et autres serveurs devraient jeter un coup d’œil à ce qui pourrait s’apparenter à un Canard Enchainé de l’informatique. Car l’information croustillante, ultra documentée, est explosive.
Pour faire court : tout un chacun fait aujourd’hui attention aux consommations de son électroménager, de son éclairage ou de sa voiture. On va plutôt choisir un frigo AAA+, une ampoule à LED ou une auto à 4l au 100 km. Mais nous nous trompons peut être de cible. Les TIC (technologies de l’information et de la communication), tous nos petits gadgets électroniques sont des ogres bien plus redoutables, dévoreurs insatiables de la fée électricité. Vous pensiez être écolo avec vos vidéoconférences, vous vous découvrez infâme pollueur.
Derrière ce message, une vraie révolution dont nous n’imaginons pas toutes les conséquences : le trafic HORAIRE actuel des données circulant sur Internet est quasi équivalent au trafic ANNUEL de l’an 2000 ! Et pour cela, il faut de l’énergie. Beaucoup d’énergie. Le monde virtuel, pour exister, consomme dans le monde réel 1500 Tera-watt heure par an soit l’équivalent de toute l’électricité consommée par l’Allemagne et le Japon réunis ! Dit autrement, faire voyager les octets dans les réseaux représente 50% de plus que tout le kérosène consommé par l’ensemble de la flotte aérienne mondiale. Un Smartphone intensivement utilisé (genre ado boutonneux) consomme plus qu’un réfrigérateur. Le hic, c’est que l’on ne s’en rend pas facilement compte, car cette énergie est diluée chez nous mais aussi sur les réseaux et les serveurs répartis sur toute la planète.
Oui mais là, je sais ce que tu vas me dire, amical lecteur: " Tout cela, c’est du domaine du professionnel, pas du particulier". Et là, tel un joueur de base-ball, je te renvoie le coup qui tue : l’énergie consommée pour regarder un film en streaming est supérieure à celle nécessaire à fabriquer et à transporter le DVD équivalent. Pire, nos opérateurs Internet qui nous proposent de stocker nos données dans le « Cloud », oublient de nous dire que cela consomme globalement jusqu’à 10 fois plus que la même donnée stockée sur le disque dur de notre vulgaire ordinateur.
Ca assomme, hein ?
Bon, je vous l’accorde, tous les chiffres sont contestables, les calculs peuvent être pervertis mais il y au moins une chose à retenir, c’est que la prochaine grande bataille de l’énergie va aussi se jouer dans le réel-virtuel. Les bataillons de serveurs informatiques, ces fameuses « fermes de calcul » qui nous abreuvent en données, devront être autre chose que d’immenses radiateurs électriques refroidis par des climatiseurs tout aussi vastes. Nos petites bébêtes téléphoniques devront aussi retrouver le droit chemin de l’économie énergivore. Allez raconter à vos gamins que nos bons vieux portables des années 2000 tenaient allègrement la semaine sans recharge et ils vous regarderont avec des yeux ronds, se demandant si vous vous moquez d’eux !
Ah oui, une dernière chose, ce rapport, que je vous conseille urgemment de télécharger, a pour titre original : « the cloud begins with coal », que vous ne devrez pas traduire malicieusement par « les nuages se forment dans la fumée du charbon » mais bien par « le Cloud commence avec le charbon ». Car si cette étude a pu exister, c’est grâce à ses sponsors, l’association nationale des mines et la coalition américaine pour une électricité propre à base de charbon.
Je vous l’ai déjà dit, en communication, les américains sont champions du monde !
On skype ?
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