Mes collègues et moi-même, tenions à vous faire part de notre profond désarroi.
Dans les temps pas si anciens, le bon vieux droit Canon rythmait parfaitement notre année. Il était facile de savoir qui fêter, et quand. On commençait le 2 janvier avec Grégoire. On terminait le 31 décembre avec Sylvestre. On passait, en juin, par la pluie de Médard et le feu de Jean. On rajoutait quelques commémorations civiles et fêtes religieuses, histoire d’agrémenter l’agenda de quelques ponts ou viaducs… et le tour était joué.
Mais voilà, la création des journées mondiales est venue bouleverser cet ordre séculaire bien établi, ne serait-ce qu’en termes de place ! Caser une Angèle ou un Laurent sur un bon vieux calendrier cartonné est facile. Mais faire tenir sur un demi-centimètre carré une «Journée Mondiale de la diversité culturelle pour le dialogue et le développement » ou une «Journée Internationale pour la préservation de l'environnement en temps de guerre» relève du miracle nano technologique.
Certes, certaines sont incontournables, comme cette admirable journée de la Femme qui a sauvé bien des couples et a fait le bonheur des fleuristes, en permettant d’effacer un oubli malencontreux d’un anniversaire.
D’autres semblent plus ésotériques pour nos pays occidentaux. Par exemple, connaissez-vous la journée des toilettes (si, si, ça existe), portée par une honorable ONG ? Ou celle du lavage des mains voulue par l’UNICEF ?
Vous l’avez compris, la pléthore de ces journées a créé un calendrier parallèle. Ainsi, le 6 mai, date d’une élection importante et sérieuse, bien connue de vous-même, se déroulait durant la journée mondiale du rire qui suivait celles du soleil, de la liberté de la presse, de l’asthme et de la sage-femme.
Mais voilà, Monsieur le Président, bien qu’ayant parcouru le listing dans tous les sens, je n’ai point trouvé d’évènement mondial de l’innovation. Etonnant quand on sait que le rôle de ces journées est « d’attirer l’attention sur des enjeux mondiaux majeurs ». D’où notre grand désarroi !
Pourtant l’innovation est universelle et caractérise magnifiquement l’espèce humaine.
- Sans innovation, nous serions toujours des bipèdes poilus, cueilleurs de baies sauvages et pétochards devant les bêtes sauvages.
- Sans innovation, nous n’aurions pas à nous questionner sur le pourquoi de billets TGV 1ère classe moins chers que ceux de seconde, là où, un siècle plus tôt, on massacrait allègrement son lumbago sur les bancs en bois de la 3èmeclasse.
- Sans innovation, nous n’aurions pas de doute métaphysique sur l’opportunité d’investir ou non sur le Time Square new-yorkais, probable future marina à la mode de l’an 2150, si la montée des océans suit celle du réchauffement climatique.
Car, Monsieur le Président, l’innovation est partout. Elle est magiquement technologique avec Ariane ou le dernier Ipad. Elle est fabuleusement marketing avec le modèle Easyjet ou les capsules Nespresso. Mais elle se cache aussi dans des pépites d’outils de production ou de nouvelles formes d’organisation.
Alors, pourquoi ne pas être promoteur d’une journée mondiale de l’innovation ? L’innovation étant toujours consensuelle, exaltante et d’un excellent retour sur investissement (un plus évident à l’heure des crises de la dette et de l’euro), il n’y a pas de raison d’hésiter !
Pour la date, pas de souci. Il suffit de choisir parmi les jours de naissance de grands noms du secteur : serial innovateurs, expérimentateurs hors pair ou « désobeisseurs »de nature. Et il y en a pléthore : Thomas Edison, les Frères Lumière, Rudolph Diesel, Louis Pasteur, Graham Bell et bien d’autres. Pour ma part, j’aime bien le 15 avril, jour où brailla, pour la première fois, un certain Léonard de Vinci, inventeur de la Joconde … et du parachute. En mariant « Art » et « Innovation »il nous a montré, de la plus belle façon, que la réussite passe par une créativité exacerbée et une technique d’exception.
Et puis, la création de la journée mondiale de l’innovation, dès 2012, année où la France célèbre le tri centenaire de Jean-Jacques Rousseau, un des plus brillants représentants du Siècle des Lumières, ne manquerait pas de panache.
Dans l’attente de vous lire, Monsieur le Président, et au nom de tous ces hommes et ces femmes de l’ombre qui transforment en business rentable des idées géniales, nous vous prions…
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