Les hommes de marketing s’arrachent les cheveux, non que le dernier shampoing « parce que je le vaux bien » ait des effets secondaires non maîtrisés, mais parce que le client n’en fait plus qu’à sa tête.
Eux qui avaient si bien réussi avec les lessives aux enzymes gloutons et les boissons « secouez-moi, secouez-moi », se trouvent totalement désarçonnés face à la plus extrême des innovations : le low cost. Toutes les stratégies qui visaient à préciser le comportement de madame Michu, cœur de cible favori du marketeur en herbe, souffrent soudain d’un strabisme divergeant ne répondant à aucune des règles des bibles des marchés.
La dernière en date vient du remarquable succès du eeePC, un ordinateur ultra portable (900 grammes) et ultra pas cher (299 euros). Les premières communications faisaient état d’un PC à destination des jeunes enfants et des technophobes endurcis, tant la simplicité était poussée à l’extrême. Le mode d’emploi pouvait se limiter à : j’allume le eeePC et toutes les applications sont disponibles (Monsieur B.G. de la société M. devrait regarder cette interface rustique mais hautement efficace). Toute la stratégie était bien résumée par le slogan « Easy to learn, Easy to work, Easy to play » (d’où les eee). Las ! Ce sont les technophiles qui s’emparent de la machine et en font le nouvel outil des itinérants avec des ventes qui propulsent le constructeur Asus dans les premiers mondiaux. Une niche de marché dormante venait de s’ouvrir.
Et ces nouveaux cœurs de marché à cibles multiples sont légions.
La Logan tant décriée, voiture peu esthétique et « invendable », destinée d’abord aux pays émergeants, puis commercialisée au compte goutte en Europe de l’Ouest, est aujourd’hui dans le TOP 10 des immatriculations. Malgré des campagnes de publicité ultra minimalistes, le phénomène risque même de s’amplifier avec l’arrivée des nouveaux modèles et la mode bobo.
Les low cost aériens, au service rustique, se trouvent confrontés à une clientèle « imprévue » auprès des entreprises à la recherche de substantielles économies.
Non, vraiment le client est devenu insupportable !
Les marketeurs ingénieurs ont bien leur littérature sur « l’étude des marchés qui n’existent pas encore » (Paul Miller). Mais avec la véritable innovation que représente le Low Cost,, tout doit se reconstruire. Il me semble pourtant judicieux de se replonger dans Roméo et Juliette, Pelléas et Mélisande, le Rouge et le Noir ou la collection Arlequin. Car les amateurs de la collection de la Pléiade ou des romans à l’eau de rose vous le diront sans complexe : une histoire de cœur, fût-elle cœur de cible, est toujours tortueuse et suit rarement les chemins attendus.
Malgré les pléthores de matière grise, les niches ouvertes par le Low Cost réserveront, encore, des sueurs froides à bien des marketeurs. Gardons donc en tête les propos du philosophe : « le cœur à ses raisons que la raison ne connaît point ».
Blaise Pascal, Roméo et Juliette seront, à n’en pas douter, le nouveaux économistes du 21ème siècle.
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