Connaissez-vous La Joconde ?
J’en étais certain ! A votre regard effaré, je sais que vous pensez que le rédacteur de cette chronique a une nouvelle fois disjoncté. Bien sûr que vous connaissez Mona Lisa dont la célébrité est inversement proportionnelle à la ridicule superficie du tableau la représentant. Point focal du Louvre, enjôleuse de premier ordre des nippons photographes et autres flots de touristes autocaristes, star quasi hollywoodienne des livres d’histoire de l’art et autres cartes postales suggérant au destinataire que, non vos vacances, ce n’est pas que du repos mais aussi de la vraie Kulture, la Joconde est LA référence absolue. Un pèlerinage à la Joconde, c’est sans problème 10 points de QI ou 20% de ventes en plus.
Mais si je vous regarde droit dans les yeux, non pas comme la Joconde qui observe derrière votre épaule (si, si, c’est vrai, faites le test), et que je vous demande à nouveau, connaissez-vous réellement la Joconde ? Vous êtes-vous demandé ce qui fait que ce tableau n’est comparable à aucun autre ?
Ok ! Joker !
Vous avez le droit d’aller chercher une reproduction dans votre vieille encyclopédie en 20 volumes ou sur votre internet technologique Wifi 802.11.
Alors, d’où vient cette exubérante admiration ? De ce demi sourire ? De ces yeux qui semblent vous suivre dans vos déplacements ? De cette délicate impression de flou crée par une admirable maîtrise du sfumato ? De ce drôle d’arrière plan d’où sortent un petit pont et un chemin venu de nulle part et repartant on ne sais où ? De cette ligne d’horizon assez perturbante, qui change de hauteur suivant que l’on regarde à droite ou à gauche de l’altière silhouette ?
Isolez chacun des éléments. Ils sont traités à la perfection par un grand maître de la Renaissance mais aucun ne semble emporter l’avantage décisif. Supprimez le supposé accessoire comme, par exemple, le paysage avec son éclairage rasant et le visage perd soudain de l’épaisseur. Tout fonctionne comme si la perfection venait d’un équilibre imperceptible entre des éléments insignifiants, la beauté ressortant de l’ensemble et non des détails, fussent-ils traités avec la plus admirable technique.
C’était le quart d’heure cultivateur de neurones artistiques. Revenons à du solide argument d’ingénieur.
Connaissez-vous la mécatronique ?
« Mais pour qui me prend-il ? » vous dites-vous dans votre fort intérieur. « Passe encore pour la Joconde, mais la techno, fût-elle mécatronique, c’est notre domaine. Il y a 10 ans, je veux bien, mais aujourd’hui la mécatronique, on en parle partout. Un syndicat professionnel s’est créé. Des normes s’écrivent. Des formations initiales se revendiquant mécatronique se déploient un peu partout en France, tant et si bien que si on les représentait par des points rouges sur une carte, nul doute que l’on diagnostiquerait une contagieuse rougeole mécatronique. L’argument marketing mécatronique commence même à avoir une certaine valeur et on peut « vendre mécatronique » sans effrayer le chaland. Alors oui, 100 fois oui, je connais la mécatronique ».
Mais si je vous pose à nouveau la question en donnant du poids à chacun des mots, aurez-vous la même assurance ? Etes-vous certain que votre maîtrise électronico mécanicienne soit la source d’une véritable exigence mécatronique. D’aucun, qu’il soit de la filière cambouis ou de la filière court-circuit croit posséder le sésame absolu. Mais cette satanée mécatronique ne se laisse pas maîtriser aussi facilement que l’on voudrait le croire. Certes, il est possible de sortir de bons produits, comme il existe de bons peintres du dimanche. Mais le chef d’œuvre, celui qui donnera un véritable avantage concurrentiel, celui là, s’abordera avec modestie, en oubliant les technologies de base pour revenir au système complet. La grande mécatronique se vit par les fonctions et … les fondamentaux de la physique. Etre capable d’englober le tout, le « macroscopique », en ignorant, dans un premier temps, les technologies du « microscopique », voilà bien la touche des rares « Léonard » de la mécatronique.
Il est toujours facile de trouver des experts capables de vous expliquer chacun des 100 centimètres de mètre, mais combien ont la vision du tout ? C’est le message que nous rappelle la mécatronique : pensez d’abord le global avant de chercher des solutions de détail. C’est, sans aucun doute, le point central que devront aussi aborder les futures formations en mécatronique, loin de l’hyper spécialisation.
J’avais écrit, il n’y a pas si longtemps, que la mécatronique était arrivée dans l’age adulte : une erreur flagrante ! La débauche d’énergie et l’exubérance des solutions actuelles me font plutôt penser à la période ado ! Mais laissons s’exprimer sans retenue cette force créatrice en action. Il sera toujours temps d’écrire le « Da Mecatroni code », lorsque la sagesse des systèmes aura suffisamment infusé. Attention ! Chef d’œuvre en devenir.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire