Horreur ! En cette période de rentrée, je vois déjà se dresser les cheveux sur la tête de professeurs, linguistes et autres académiciens. Quoi ! Osez écrire innovation avec 2 s !
Et pourtant, qu’il serait bon de pouvoir accepter cette modification orthographique pour faire rimer innovation avec passion.
Car c’est bien une passion pour l’innovation qui a saisi cet été les milieux politiques et économiques :
Après la création d’Oseo (Anvar-BDPME) au printemps, c’est toute la dynamique autour des pôles de compétitivité, de l’agence nationale pour la recherche, et de l’agence pour l’innovation industrielle qui s’est mise en place.
Les journaux se sont emparés du phénomène avec des titres tapageurs : « la relance de la politique industrielle », « la France découvre son industrie », « le nouveau patriotisme industriel ».
Passion pour l’innovation et « redécouverte » de l’industrie : ne boudons pas notre plaisir, tant il est vrai que notre logique depuis la création de Thésame, est de placer l’innovation au cœur de l’accompagnement économique industriel.
Oui, mais ! … Car il y a des « mais ». La logique de pôle, porte en elle des germes d’effets collatéraux dont il faut avoir conscience pour mieux les maîtriser.
Le complexe de la cour des grands
D’abord en terme d’efficacité : on est parti d’une quinzaine de pôles pour arriver à 67 labellisés. Avons-nous réellement 67 secteurs d’envergure mondiale ?
Pour reprendre l’analogie de la rentrée, tout le monde ne pourra pas jouer dans la cour des grands ! Aussi est-il réconfortant de voir s’établir des relations entre des pôles aux thématiques connexes afin de répondre aux besoins industriels. Dans nos secteurs « du décolletage à la mécatronique », les liens initiés dès le début avec l’électronique de Minalogic (Grenoble) ou Microtechnique (Besançon) sont évidents et le pôle mécanique ViaMeca (Rhône-Alpe-Auvergne-Centre) apporte de possibles optimisations. Mais il faut aller vite.
C’est pour cela, qu’il nous semble important que certains points soient traités à un niveau national. Est-il réellement nécessaire que 67 pôles planchent sur la propriété industrielle et les contrats de collaborations inter-entreprises ? Il y aurait, là,un gain de temps et d’argent à établir, pour tous les pôles , des documents standards adaptables aux divers projets.
Les veilleurs se réveillent
Le second point concerne la veille économique et stratégique. Ne soyons pas naïfs ! Dans la concurrence économique mondiale, nul doute que les « veilleurs » des autres pays doivent analyser, d’une part, les stratégies des pôles et d’autre part, regarder les entreprises impliquées.
Car un des effets des pôles est d’orienter les projecteurs sur des entreprises à fort potentiel innovant. De ce simple fait, ces entreprises prennent une valeur nouvelle dans une logique d’achat-vente. Si l’on ne veut pas que le syndrome GEMPLUS ne se reproduise (rachat de la technologie française de carte à puce par un groupe américain), il est urgent que des mécanismes de protections des « pépites » se mettent en place. Il n’y a pas que dans l’électronique ou la biotechnologie que l’on trouve de la haute technologie. Ariane, l’automobile ou Airbus ont tout autant besoin de mécanique, de chimie ou de plastique ! Repérer, accompagner et protéger les entreprises leader d’une technologie ou ayant un vrai avantage concurrentiel est essentiel pour leur permettre d’atteindre l’envergure mondiale.
L’innovation molle
Enfin, tout comme l’on parle de science dure et science molle, le troisième point concerne « l’innovation molle » (organisation et service) complémentaire de « l’innovation dure » (produit et process). Comme l’a récemment ré exprimé le PDG du Groupe SEB sur l’antenne de France Inter, le maintien de l’industrie européenne passe par des produits innovants et par la performance industrielle. Même si ce dernier point n’était pas explicite dans l’appel d’offre des pôles qui se focalise sur le « hard », nous avons volontairement choisi d’avoir une partie de réponse «hors sujet» en introduisant massivement du «soft», tant il est vrai que les gisements de valeur ajoutée existent aussi dans les organisations industrielles et les systèmes d’information.
Il est heureux de voir la prise de conscience actuelle quand au devenir du secteur industriel dans l’économie. La compétitivité de nos entreprises ne se fera pas sans innovation. Et l’innovation, qui est avant tout une affaire d’hommes et de femmes, doit se vivre avec passion pour réussir. Alors acceptons cette entorse à l’orthographe et écrivons dès aujourd’hui innovassion avec 2S !
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