lundi 12 décembre 2005

Génération Harry POTTER

Depuis 5 ans maintenant, nous nous impliquons fortement dans les Olympiades de la Physique, concours « confidentiel », porté à bout de bras depuis 10 ans, par l’Union des Physiciens de France.

L’objectif de cette manifestation est de permettre à des jeunes de première et terminale de mener à bien un projet scientifique associant théorie et pratique. Nous avons vu passer des projets fabuleux : création de soufflerie aérodynamique à partir d’un « souffleur de feuilles » et compréhension du principe de fonctionnement des ailes d’avion, étude des bulles de savon et réalisation de bateaux propulsés grâce aux différences de tensions superficielles des liquides, écoute des émissions radio des météorites entrant dans l’atmosphère ou réalisation d’appareils photos numériques simplifiés.

Cette année, les projets présentés au CCSTI de Cran-Gévrier (74) le 7 décembre promettent étaient tout aussi passionnants : la formation des nuages et des tornades, la super cavitation des bulles, la lumière pour prendre le pouls, la bataille des panneaux solaires et même une mini pièce de théâtre sur les aimants !

Il est de bon ton de s'apitoyer sur la désaffection des jeunes pour les filières scientifiques.

Les jeunes des Olympiades nous démontrent pourtant tous les ans que l’on peut inverser la tendance si l’on accepte de dépasser le simple discours. Dans la pratique, notre action volontariste et le dévouement de professeurs de Physique ont fait que la Haute-Savoie est devenue le département français le plus représenté aux Olympiades. Les équipes de jeunes ont raflé de nombreux prix dont des premières places lors des précédents concours.

Arrivons-nous pour autant à mobiliser massivement les lycées, les élus politiques ou les médias pour donner l’ampleur nécessaire à cette manifestation ? Force est de constater que la réponse est malheureusement encore négative.

Si nous ne sommes pas capable de changer les choses d’un coup de baguette magique, acceptons de « perdre » une heure pour regarder d’un petit peu plus près cette génération « Harry Potter ». Elle est capable de nous étonner par son ingéniosité, et nous avons là de vrais scientifiques en devenir.

…et comme dit Harry « Lingardium Leviozia » !

mardi 8 novembre 2005

Eloge à la désobéissance


Il y a plus redoutable encore que la feuille blanche en prévision d’une future chronique, c’est la préparation d’un discours à l’attention de jeunes diplômés fraîchement sortis d’une formation bien évidemment prestigieuse ! La survie en amphi nécessite alors de réussir au premier coup si l’on veut éviter une sanction trop brutale !


Voici donc un extrait d’un message que nous aurions peut-être intérêt à ne pas oublier trop vite, malgré nos statuts de brillants managers.



« Loin des stratégies de pouvoir, avoir de l’ambition n’est pas une tare mais une qualité. On vous a appris, au travers d’un cursus de grande qualité à être dans un moule bien formaté de gens normaux et rationnels. Faut-il pour autant oublier ce qui fait aussi toute votre richesse : acceptez de laisser parler votre côté intuitif !

Le rationnel fait appel aux règles pour éliminer l’incertitude
L’intuitif se délecte dans les boites à idées

Le rationnel favorise la gestion précise et bureaucratique
L’intuitif décide et assume

Le rationnel applique les procédures
L’intuitif transgresse les règles

Le rationnel tient les budgets
L’intuitif maîtrise l’information

Le rationnel fait la chasse aux coûts visibles
L’intuitif débusque les coûts cachés

Le rationnel se focalise sur la réduction des coûts et des délais
L’intuitif va rechercher la valeur ajoutée et la valeur perçue par le client.

Le rationnel obtiendra les résultats prévus … depuis longtemps
L’intuitif crée les sauts technologiques imprévisibles

Le rationnel a compris que l’organisation ne laisse pas de place à l’inconnu
L’intuitif a compris qu’il était l’inconnu pour l’organisation

Aussi, si vous avez le goût du risque, si vous n’avez pas peur d’être parfois vu comme un OVNI, si vous acceptez de transgresser les règles, favorisez sans hésiter votre côté intuitif.

Le concept de la Twingo a pu exister parce que un certain Yves Dubreuil, l’un des très grands chefs de projet de Renault, a laissé parler le côté intuitif de ses équipes. Désobéir aux grands standards, a permis de prendre une avance de près de 10 ans sur les concurrents comme C1, 107 ou Aygo qui sortent aujourd’hui.

Plutôt que de parler de l’innovation, acceptez de la vivre au quotidien car c’est une hygiène intellectuelle et une manière de manager qui fédère les équipes et décuple les énergies.

On vous a appris le rationnel, mettez en route votre moteur intuitif ! C’est un acte de désobéissance dont on vous remerciera un jour ! »

vendredi 30 septembre 2005

Ouvrez les fenêtres !

L'information n'est pertinente que si elle est délivrée au bon moment.


Je reste souvent étonné par la satisfaction, affichée par certains, quand au développement de ce que l'on qualifie ici d'intelligence économique ou là de veille stratégique.

S'il est vrai que des progrès nombreux ont été faits vis à vis de la collecte d'informations, je m'interroge toujours sur les méandres de transmission de ladite information aux bonnes personnes.

Ce n'est plus de la mise en oeuvre technique, mais c'est un problème de management : telle information technique rejoint le bureau d'étude, alors qu'elle aiderait le commercial dans sa négociation !Telle autre finit ici dans un tiroir alors qu'elle est rachetée ailleurs dans la même entreprise !

Ne souriez pas, vous connaissez ces cas.

Je n'ai pourtant pas de solution toute faite, car c'est avant tout une affaire de personne. Pendant que la "bonne" qualité nous propose de créer des processus transverses à l'entreprise, la complexité des métiers, le stress, la définition des fonctions construisent des barrières de plus en plus hautes entre les individus, les services, les départements, les directions ...

N'oublions pas que si la machine à café est un excellent outil de productivité dans la transmission de l'information, elle n'a qu'un rayon d'action limité !

Créer une véritable culture d'entreprise basée sur la transmission des savoirs est un vrai challenge qui reste toujours à relever.

Alors si la veille ne passe pas encore les murs, ouvrez les fenêtres ! Le souvenir de cette chronique vous aidera à maintenir vivaces la bonne décision que vous venez de prendre.

mercredi 7 septembre 2005

innovation ou innovaSSion

Horreur ! En cette période de rentrée, je vois déjà se dresser les cheveux sur la tête de professeurs, linguistes et autres académiciens. Quoi ! Osez écrire innovation avec 2 s !

Et pourtant, qu’il serait bon de pouvoir accepter cette modification orthographique pour faire rimer innovation avec passion.

Car c’est bien une passion pour l’innovation qui a saisi cet été les milieux politiques et économiques :
Après la création d’Oseo (Anvar-BDPME) au printemps, c’est toute la dynamique autour des pôles de compétitivité, de l’agence nationale pour la recherche, et de l’agence pour l’innovation industrielle qui s’est mise en place.

Les journaux se sont emparés du phénomène avec des titres tapageurs : « la relance de la politique industrielle », « la France découvre son industrie », « le nouveau patriotisme industriel ».

Passion pour l’innovation et « redécouverte » de l’industrie : ne boudons pas notre plaisir, tant il est vrai que notre logique depuis la création de Thésame, est de placer l’innovation au cœur de l’accompagnement économique industriel.

Oui, mais ! … Car il y a des « mais ». La logique de pôle, porte en elle des germes d’effets collatéraux dont il faut avoir conscience pour mieux les maîtriser.

Le complexe de la cour des grands
D’abord en terme d’efficacité : on est parti d’une quinzaine de pôles pour arriver à 67 labellisés. Avons-nous réellement 67 secteurs d’envergure mondiale ?
Pour reprendre l’analogie de la rentrée, tout le monde ne pourra pas jouer dans la cour des grands ! Aussi est-il réconfortant de voir s’établir des relations entre des pôles aux thématiques connexes afin de répondre aux besoins industriels. Dans nos secteurs « du décolletage à la mécatronique », les liens initiés dès le début avec l’électronique de Minalogic (Grenoble) ou Microtechnique (Besançon) sont évidents et le pôle mécanique ViaMeca (Rhône-Alpe-Auvergne-Centre) apporte de possibles optimisations. Mais il faut aller vite.

C’est pour cela, qu’il nous semble important que certains points soient traités à un niveau national. Est-il réellement nécessaire que 67 pôles planchent sur la propriété industrielle et les contrats de collaborations inter-entreprises ? Il y aurait, là,un gain de temps et d’argent à établir, pour tous les pôles , des documents standards adaptables aux divers projets.

Les veilleurs se réveillent
Le second point concerne la veille économique et stratégique. Ne soyons pas naïfs ! Dans la concurrence économique mondiale, nul doute que les « veilleurs » des autres pays doivent analyser, d’une part, les stratégies des pôles et d’autre part, regarder les entreprises impliquées.
Car un des effets des pôles est d’orienter les projecteurs sur des entreprises à fort potentiel innovant. De ce simple fait, ces entreprises prennent une valeur nouvelle dans une logique d’achat-vente. Si l’on ne veut pas que le syndrome GEMPLUS ne se reproduise (rachat de la technologie française de carte à puce par un groupe américain), il est urgent que des mécanismes de protections des « pépites » se mettent en place. Il n’y a pas que dans l’électronique ou la biotechnologie que l’on trouve de la haute technologie. Ariane, l’automobile ou Airbus ont tout autant besoin de mécanique, de chimie ou de plastique ! Repérer, accompagner et protéger les entreprises leader d’une technologie ou ayant un vrai avantage concurrentiel est essentiel pour leur permettre d’atteindre l’envergure mondiale.

L’innovation molle
Enfin, tout comme l’on parle de science dure et science molle, le troisième point concerne « l’innovation molle » (organisation et service) complémentaire de « l’innovation dure » (produit et process). Comme l’a récemment ré exprimé le PDG du Groupe SEB sur l’antenne de France Inter, le maintien de l’industrie européenne passe par des produits innovants et par la performance industrielle. Même si ce dernier point n’était pas explicite dans l’appel d’offre des pôles qui se focalise sur le « hard », nous avons volontairement choisi d’avoir une partie de réponse «hors sujet» en introduisant massivement du «soft», tant il est vrai que les gisements de valeur ajoutée existent aussi dans les organisations industrielles et les systèmes d’information.

Il est heureux de voir la prise de conscience actuelle quand au devenir du secteur industriel dans l’économie. La compétitivité de nos entreprises ne se fera pas sans innovation. Et l’innovation, qui est avant tout une affaire d’hommes et de femmes, doit se vivre avec passion pour réussir. Alors acceptons cette entorse à l’orthographe et écrivons dès aujourd’hui innovassion avec 2S !

mercredi 2 mars 2005

J'habite dans une station de ski !

En ce samedi, nous venions de mettre la touche finale au dossier de pôle de compétitivité « du décolletage à la mécatronique ». Deux mois, d’une charrette intensive où les 35 heures se faisaient tous les 3 jours. Deux mois pour un résultat à la hauteur des espérances grâce à la mobilisation de tous.

Après cette période « d’ermite », la décision était prise de partir pour une journée sur les pistes de ski : le soleil et la neige abondante de cet hiver le permettaient !

Assis sur un télésiège, le dialogue s’installe avec mon voisin, responsable d’une entreprise d’agro alimentaire en Ile de France (une montée de 20 minutes, c’est long dans le silence, même avec un splendide panorama).

- Vous travaillez ici ?
- Oui je m’occupe de développement technologique pour l’industrie
- Parce qu’il n’y a pas que du tourisme en Haute-Savoie ?

Devant mon air étonné, mon colocataire de télésiège me demande des explications. Et moi de citer les 60 000 emplois industriels, les 250 brevets annuels, les 1500 chercheurs, les grosses entreprises leaders mondiaux, la dynamique micro-nanotechnologie du sillon alpin, la spécialité historique de la mécanique de précision (décolletage), la mutation vers la mécatronique, les réseaux de benchmarking des industriels, les opportunités de rencontres, en moyenne une tous les 3 jours, au travers des évènements organisés, l’arrivée massive des capitaux étrangers pour constituer des groupes de taille mondiale pour le secteur automobile (là, je fais en résumé pour la newsletter !).

En m’écoutant, la question fuse :

- Pour aussi bien connaître le secteur, vous devez être originaire du coin !
- Non, je suis arrivé ici il y a 4 ans, après avoir travaillé dans un grand groupe mondial en région parisienne.

C’est au tour de mon interlocuteur d’être étonné.

Mais comment peut-on expliquer l’efficacité que l’on peut rencontrer en « province » : la possibilité d’enchaîner cinq rendez-vous dans la même journée sans se poser la question du trafic routier, l’ouverture au grand export avec un aéroport international à moins de 30 minutes (combien de temps me fallait-il pour rejoindre la Défense à Charles de Gaulle en fin de journée ?), la concentration sur une distance de quelques kilomètres de spécialités d’excellence mondiale, l’esprit réseau, une université très maillée avec le tissu industriel,des expérimentations comme la fédération de recherche mécatronique regroupant plusieurs laboratoires, un réseau autoroutier dense maillant bien la région rhône-Alpes à ses voisins européens. Tout un « melting pot » qui assure la performance d’un territoire.

Les pôles de compétitivité auront au moins cette vertu. Celle de mettre le projecteur sur des zones où se conjuguent la réactivité de la PME, la puissance du groupe industriel, une vraie recherche appliquée … et une formidable envie de réussir de tous les acteurs. L’Europe qui se construit, est une Europe des régions. Et si demain la Haute-Savoie devient le référant européen de la mécatronique, ce qui est accessible dès aujourd’hui, je pourrai enfin dire avec un clin d’œil à mon futur voisin de télésiège : « j’habite dans une station de ski ».

samedi 1 janvier 2005

Le devoir d'agir

En ce premier de l’an 2005, comment pouvions-nous faire taire les images que nous avions tous en tête, en provenance du Sud-Est Asiatique ?


Catastrophe à l’échelle d’un continent.

26 décembre 0h 58mn49s (TU) : c’est encore Noël en Amérique. Ici, au large de Sumatra, se déclenche l’un des plus grands tremblements de terre du siècle. Incompréhensible, au travers des chiffres, il ne nous reste que les comparaisons pour visualiser le phénomène. Imaginez les Alpes, de Genève à la Côte d’Azur, se déplaçant en 3 minutes de 10 mètres et se surélevant de 2. Tout cela sous plusieurs milliers de mètres d’eau, déclenchant, du coup, la vague géante qui a tout balayé sur son passage à l’approche des côtes.
En eau profonde, un Tsunami est imperceptible par les navires : quelques dizaines de centimètres d’amplitude pour une longueur d’onde de 250 km et une vitesse de propagation de 700 à 800 km/h. Par faible profondeur, son énergie se condense sur une distance beaucoup plus courte, ce qui engendre des vagues meurtrières et destructrices dont la vitesse est d’environ 40km/h et la hauteur, variable avec la configuration des côtes, peut atteindre facilement la quinzaine de mètres,voire plus.

C’est ce qui s’est produit tout autour du golfe du Bengale.

Cet épisode dramatique nous amène à formuler trois constats :

1- Gardons nous bien du syndrome de « lucidité rétrospective ». Prévoir l’évènement était impossible. Prévenir les populations de l’arrivée du Tsunami était difficile. Tous les tremblements de terre sous-marins ne déclenchent pas de raz de marée, heureusement ! Dans cette zone de forte activité sismique, les risques de Tsunami extrême étaient connus mais considérés comme limités. Comment, dans ces conditions, maintenir la conscience d’un danger auprès de toute une population, lorsque celle-ci ne l’expérimente jamais ? On nous a parlé du réseau d’alerte aux Tsunami du Pacifique. Mais les échelles sont tout autres ! Il faut 20 heures pour qu’un glissement de terrain au large du Chili entraîne une vague au Japon. Ici, en moins de 2 heures, tout était fini. Certes, il n’y avait pas ces fameuses bouées d’alerte émergées en pleine mer, mais vous découvrirez, comme nous, en surfant sur Internet que ce système est encore expérimental et a été mis en service il y a juste 3 ans . A l’heure où notre société moderne recherche le risque zéro, la nature nous rappelle de façon brutale que, bien souvent, c’est elle qui reste maître du jeu.

2- Cette catastrophe est sans aucun doute la première catastrophe planétaire. Expliquons-nous. Il y a bien eu en Chine, en 1976, un séisme extrême ayant tué 250 000 personnes (peut-être même 700 000), mais ici en décembre 2004, par les effets du tourisme mondial, on découvre que, au-delà, de la Région touchée, ce sont de très nombreux pays qui sont directement concernés. Les morts ne sont plus des statistiques anonymes mais des visages de compatriotes ou de voisins, faisant que chacun s’approprie le drame. Cela nous amène au troisième constat.


3- C’est la première fois, qu’une mobilisation d’une telle ampleur et qu’une telle prise de conscience se font à l’échelle de la Terre. Au-delà des grands médias classiques, Internet a joué et joue un rôle essentiel dans cette diffusion de l’information et de mise en relation. De part sa robustesse, le réseau a souvent été le seul lien vers l’extérieur, pourvoyeur de données et d’images (n’oublions pas pour autant les radioamateurs qui, dans les zones totalement isolées sont au premier plan). Internet est aussi, et c’est sans doute là qu’il démontre toute sa légitimité, un outil d’aide à la reconnaissance des disparus
.

Reste la réalité du désastre. Devant l’immensité de la tâche à accomplir, le monde entier se mobilise d’une manière jamais connue jusque là. Que pouvons-nous faire à notre échelle ? Vous êtes entre 3000 et 4000 à lire cette newsletter en Europe.

Je vous proposerai donc 3 actions simples.

La première, sera que chacun d’entre nous apporte son soutien à l’une des organisations humanitaires dont il se sent le plus proche. Une carte bancaire et un lien Internet, un chèque et une enveloppe : il n’y a rien de plus simple.
La seconde, sera de renvoyer cette newsletter à 10 personnes (ou plus) de votre carnet d’adresse mail.
La troisième sera de noter dans votre agenda, au mois de Juin 2005, le mot Tsunami. Cela pour se souvenir, dans 6 mois, de ceux qui rebâtiront, alors que les projecteurs des médias se seront éteints.

Ce sera aussi, pour nous tous, le moyen de nous rappeler que le mot Humanité, est le seul nom commun que nous nous devons d’écrire toujours avec un H majuscule.